Artist - FABIENNE CRESENS

LA MONTÉE DES EAUX de Fabienne Cresens
De la lumière à l’obscurité, Fabienne Cresens est photographe autodidacte belge. Née en Afrique, elle ne cesse depuis l’âge de dix-sept ans, d’élargir le champ de son art, de l’argentique au numérique jusqu’au photophone aujourd’hui, avec ce qu’elle nomme des objets photographiques qui ouvrent la voie à de nouvelles expérimentations fécondes qu’elle mène principalement à Bruxelles, ville en et de création(s). Quand notre perception de la réalité est asphyxiée au point de faire naître le doute sur la vérité de ce qu’on voit et jeter ainsi la confusion dans les consciences, Fabienne Cresens travaille sur l’archéologie du réel, ses chutes et ses beautés. C’est toute la subtilité du travail au long cours de Fabienne Cresens. Il échappe à tous les partages binaires. Il fait chemin(s). C’est dans ce sillage que semble avoir été conçue l’exposition La Montée des eaux ; l’idée d’une série de regardeur.e.s en bonnets de bain en noir et blanc tendue entre le petit fait vrai et le destin de l’humanité.
Dans La Montée des Eaux de Fabienne Cresens, ce sont des visages à pensées, des paysages d’étrangeté, des moments de passion, que nous parcourons, regardons, immergés dans des univers qui nous pénètrent, où se déversent le « je » et le « nous ». On en ressort différent, transformé par une question : « Que veulent ces images qui se soustraient à la matière et au temps ? Que veulent-elles de moi ? ».
Au cœur du travail de Fabienne Cresens, il y a la vision brisée, sombre, rendue au lyrisme. Mais un lyrisme qui se veut profondément réaliste et humaniste dans, entre et avec les images. Il y a là quelque chose de subtilement poélitique, à la fois narratif, politique et esthétique.
Depuis 2009, la photographe pose un regard sans concessions mais non dénué de douceur sur une réalité que beaucoup se refusent encore à voir : les dérèglements climatiques. Et aujourd’hui, elle surprend en ceci qu’elle compose une série photographique en noir et blanc de pure attention à son environnement, aux êtres humains et aux animaux qui y sont reliés.
Ici, Fabienne Cresens s’approche au plus près d’un visage, de l’enfant à l’adulte, connu ou moins connu, comme s’il était vu pour la première fois. Le visage est nu, simple et bouleversant, étonnamment vivant. Il raconte yeux ouverts et bouche fermée quelque chose de ce que les hommes font aux montagnes, aux forêts, aux glaciers, au ciel comme à la terre. Là, le visage fixe va à l’essentiel pour incarner une responsabilité, une vigilance, une attitude face à la destruction puissante des éléments en furie - pluies torrentielles, inondations, vents dévastateurs, tempêtes, cyclones ou tsunamis.
La série La Montée des Eaux ne s’alourdit pas de pédagogie explicative ou de considérations morales bon marché pour dire « non » au cauchemar d’anéantissement final. Dans une douceur entêtante, elle impose un regard à l’acuité sensitive et magnétique. Dans ses plus infimes soubresauts, son ascétique beauté, sa révolte silencieuse est le signe d’une possible (re)naissance au monde, un autre pas. Hic et nunc, les visages ne dorment jamais.

Notes, Sylvia Botella, janvier 2019

Art works
Biography

La photographie est le lieu privilégié d’où il est possible d’exprimer mes engagements, mes craintes, mes angoisses. Et d’avoir la liberté constante de recalculer ma distance avec eux, souvent avec humour, dérision. La photographie surprend en ceci, qu’elle est libre, critique, toujours entrainée dans un mouvement d’une acuité extrême. Et qu’elle peut inventer un monde redevenu humain : les uns avec les autres pleinement conscients de notre environnement. À l’origine, la série La Montée des Eaux débutée en 2009 et exposée pour la première fois il y a quatre ans, ne
devait pas se poursuivre au-delà des dix-neuf portraits existants. Mais au regard des effets dramatiques des dérèglements climatiques, dont notamment la montée des eaux de la Seine à Paris, j’ai décidé de continuer mon travail de photographie. Il comporte à ce jour une centaine de photos qui parlent sans le dire sans cesse de notre responsabilité à l’égard des générations à venir. Nous ne pourrons pas leur dire : nous ne savions pas.

Je remercie tous les modèles qui ont accepté de poser pour moi. Car l’exercice est difficile.
L’âme est dénudée. Il n’y a aucun artifice. Seule la substantifique moelle surgit ici.

À Alain Cresens, mon frère jumeau disparu trop tôt.

Fabienne Cresens
 


Expositions 
La Montée des Eaux
Galerie Martine Ehmer (be), Piscine Victor Boin (exposition permanente), Bruxelles (be), Salon de la Photo,
Paris (fr), Regards au féminin, Strasbourg (fr), Confrontations Photo, Gex (fr), Nuits des Arts, Roubaix (fr),
Galerie De Lumière et de Vent, Carteret (fr), BOZAR, Bruxelles (be), Rencontres Photographiques d’Arlon (be),
Maison des Cultures Saint-Gilles, Bruxelles (be), La Bellone, Bruxelles (be),
En extérieur : Péniche Cancale, Dijon (fr), Théâtre des Doms, Avignon (fr), Parc Domaine Divonne-les-Bains (Fr),
Rue Ravenstein, Bruxelles (Be), Mois de la photographie de Dol-de-Bretagne (fr), Smile Hasselt (collectif avec
Erwin Olaf, Oleg Dou, …)
Crazy Music
Collectif La Perche / avril-juin 2019 (be), Atelier d’architecture François Martens (be), Centre culturel de Tubize,
Muzicdoc2 Fest (be), T’ink Studio(be)
Eternelle Jeunesse
Centre culturel de Wanze (be), Atelier d’architecture François Martens (be), Halles Saint-Géry (be), BOZAR (be),
Centre culturel Les Riches Claires (be), Centre Culturel Jacques Franck (be), Résidence Wiart (be)

Musardises (photophones)
Collectif La Perche (be), résidences seniors Wallonie (be), Maison du Peuple de Saint-Gilles (be)
Sauvages Imaginaires (nouvelle série)
L’Hostellerie, Dijon, septembre 2018-janvier 2019 (fr)